mercredi 25 avril 2012

...langue en danger.

Apparemment la langue arabe est en danger au Qatar et plus généralement dans les pays du Golfe. Je ne trouve pas ça particulièrement étonnant car avec 80% de population immigrée dont une large moitié n'est pas arabophone le moyen de communication le plus utilisé est l'anglais (je me demande si je ne devrais pas plutôt écrire " l'anglais " entre guillemets vu le niveau de certains...).

Au Qatar deux mesures ont récemment été prises pour lutter contre cette "désarabisation" du pays.

Tout d'abord le Supreme Education Council (SEC) a décidé que, du jour au lendemain, dans les Universitées qatariennes l'arabe devrait remplacer l'anglais dans les cours de droits, administration et affaires internationales entre autres. Et tant pis pour les étudiants étrangers non-arabophones inscrits dans ces cours, zavaient qu'à parler arabe..ou à pouvoir se payer une des nombreuses et (hors de prix cela va sans dire...) universités nord-américaines présentes à Doha. Quant aux profs non arabophones enseignant ces matières...
Si je comprends bien l'idée, plutôt bonne en soi, de proposer un enseignement supérieur dans la langue originelle du pays, la manière me semble quand même un peu cavalière...Ça ne pouvait pas attendre la prochaine rentrée scolaire???

Toujours dans la même optique de défense de la langue arabe l’Émir a  signé une loi qui spécifie que toutes les affiches publicitaires doivent dorénavant être en arabe. Une  seule autre langue peut-être utilisée uniquement de manière complémentaire, si la municipalité dans laquelle l'affiche doit être exposée l'accepte. J'ai cherché ce matin pendant plus d'une demie heure sur internet quelle était la position officielle de la municipalité de Doha en la matière mais je n'ai rien trouvé (en anglais tout au moins! ;-) ). mais il me semble bien, d’après ce que j'ai vu dans les rues jusqu'à présent qu'ici c'est seulement arabe sans un  seul mot d'une autre langue (à part le nom de la marque dans certains cas et la référence au site internet). On espère seulement que le niveau d'arabe de ces publicités sera amélioré car, si j'en crois certains forums,  il n'est pas tellement supérieur au niveau d'anglais des affiches qui m'énervaient tant.

J'attends avec impatience de voir quel sera l'impact économique d'une telle mesure. Si j'étais annonceur je réduirais mes campagnes par deux, vu qu'elle ne seront plus comprises, au mieux, que par la moitié de la population. Bien sûr les marques très riches et très haut-de gamme s'en sortiront toujours grâce aux créatifs qu'elles paieront à prix d'or noir et qui produiront une affiche "muette" mais tout de même parlante.
Pour les fastfoods et autres sodas ça risque déjà d'être plus difficile...et encore, eux pourront compter sur leur logo.
Quant aux autres, finalement on s'en fout ça  fera moins de distractions sur la route ce qui, ici, ne peut être qu'une bonne chose!

8 commentaires:

Mahie a dit…

Je dois avouer que si c'est en effet un peu cavalier de faire le changement en plein milieu d'années je trouve juste que les cours soient en arabe au Qatar...
Les étrangers qui viennent étudier en France apprennent le français pourquoi les étrangers qui viennent au Qatar n'apprendraient pas l'arabe?
Ca me semble juste... Après tout ils ne sont pas une colonie... Non?

Dr. CaSo a dit…

C'est un peu ce qui s'est passé en France (en ce qui concerne la publicité), non? Je me demande quel a été l'impact de ça en France.

Et tes enfants n'apprennent pas l'Arabe?

geneline a dit…

L'Algérie a eu la même démarche d'arabisation, de façon un peu moins brutale. Les universitaires, en particulier les scientifiques, même arabophones, disaient rencontrer d'énormes difficultés, l'arabe n'étant pas pour eux un véhicule adapté à la transmission d'un savoir et le contact avec la communauté scentfique internationale était alors très difficile.
La mini-taille du Qatar doit encore aggraver la difficulté ; comment trouver dans un pays aussi petit les enseignants qataris de qualité, formés en arabe ?

E. a dit…

@ Mahie: ça pose quand même pas mal de problèmes comme c'est expliqué dans l'article.

@ Dr. Caso: Mon fils apprend un peu mais franchement je ne suis pas impressionnée.
Pour les pubs j'ai fait très attention ces derniers jours et je crois que ça dépend vraiment des municipalités. En France c'était quand même un peu différent, c'était l'utilisation d'une autre langue, l'anglais le plus souvent, pour faire jeune, branché où je ne sais quoi. ici il y a des pubs (des compagnies de téléphones mobiles par exemple qui étaient spécifiquement destinées à une partie de la population ( du style "call home for only 55Dh/minutes ) rédigées dans la langue natale de cette population. je ne vois carrément pas l'intérêt d'avoir ce genre de pub pour les Sri-lankais qui lisent déjà à peine anglais en arabe!)

@ Geneline: c'est exactement le même problème ici à la différence qu'il y a les moyens de faire venir des profs arabophones. Et la situation est quand même un peu différente car en Algérie c'était en réaction à une colonisation et surtout décolonisation qui ne e sont pas trop bien passées!

geneline a dit…

Je ne pense pas que l'arabisation générale en Algérie qui date des années 90 se ramène aux seules séquelles de la colonisation 30 ans après l'indépendance. Le problème est plus complexe, avec entre autres la question berbère et l'islamisation.

Anonyme a dit…

Oui c'est étrange que cette mesure soit appliquée au beau milieu d'un semestre universitaire ! !( tu es vraiment sûre qu'ils l'ont fait ? )... mais tu sais je ne pense pas qu'il y ait des étudiants non arabophones dans les universités qataries, ... ça doit être comme dans les universités saoudiennes ...et pour les enseignants c'est la même chose...à part dans les études médicales et para médicales et dans l'ingénierie aussi, où l'enseignement en langue anglaise est par ailleurs conservé et là c'est malheureusement une obligation parce qu'il n'existe pas suffisamment d'ouvrages en langue arabe dans toutes les matières et les spécialisations enseignées ... Tu sais les étudiant-e-s qatari-e-s, saoudien-ne-s, jordanien-ne-s, égyptien-ne-s .... ont un mérite extraordinaire pour pouvoir étudier ainsi des matières extrêmement difficiles dans une langue qui n'est pas la leur .. C'est triste aussi quand tu penses que les Arabes ont été à une époque les fers de lance dans le domaine de la médecine ...
(il n'y a qu'en Syrie que toutes les spécialisations, médicales et non médicales, sont enseignées en arabe... c'est une décision qui a été prise, avec courage, il doit y avoir une quinzaine d'années ou peut-être moins ... )

clau

Berliniquais a dit…

Le post est très intéressant et les commentaires également. Ce n'est pas étonnant que dans dans un pays comme le Qatar, où 80% de la population est étrangère, la question se pose avec une certaine acuité.

Ici en Allemagne, il y a beaucoup plus de laxisme qu'en France à propos de la défense de la langue nationale. Je trouve cela parfois étonnant, vu la quantité d'affiches et autres supports publicitaires, etc, qui sont entièrement dans la langue de Shakespeare. Le public est dans son ensemble assez peu sensible à ces questions. Même si j'aime la langue anglaise, je trouve cela parfois dommage la quantité d'anglicismes parfois complètement ineptes qui nous sont balancés à la figure (il y a eu la fameuse campagne "F*ck the diet" avec le f-word écrit en toutes lettres...).

Je trouve qu'en France nous avons une attitude raisonnable à ce sujet : vous voulez nous vendre votre camelote, alors parlez-nous dans notre langue. N'est-ce pas la moindre des choses ?

Moi j'aime les langues et je préfère que chacun s'efforce d'en parler plusieurs et de respecter la langue du pays où il se trouve, même si c'est diablement pratique que l'anglais soit maintenant si largement enseigné et compris dans le monde (cela m'a bien aidé à mes débuts à Berlin, évidemment).

À bientôt et bon courage avec la canicule !

E. a dit…

@ Clau: si je crois l'article le cas des étudiants non-arabophones était évoqué donc...

@ Le Chroniqueur: je suis aussi d'accord avec l'utilisation de la (des) langue(s) nationale (s) dans les publicités en général mais la situation est tout de même très particulière. D'après mes observations ce n'est pas encore complètement appliqué (est-ce que ça le sera un jour?...) et il y a de toute façon de très nombreuses exceptions (événements internationaux, sportifs, caritatifs, culturels etc...) qui constituent tout de même une bonne partie de l'affichage publicitaire ici...